Scandale du chlordécone aux Antilles : les députés votent en faveur de la responsabilité de l’État
6 mars 2024 11:09
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Le jeudi 29 février dernier, les députés ont voté une proposition de loi socialiste visant à reconnaître la responsabilité de l’Etat dans le scandale sanitaire du chlordécone. Dès 1979, l’OMS avertissait de la dangerosité de ce pesticide. Pourtant, il a continué à être utilisé dans les bananeraies des îles de la Guadeloupe et de la Martinique pour lutter contre le charançon de la banane, un insecte qui détruisait les cultures et menaçait de ralentir la production. Résultat : le chlordécone s’est répandu partout, empoisonnant les sols, l’eau des rivières, le littoral, les crustacés… et les organismes humains.
Les effets désastreux du chlordécone sur la population et l’environnement
Le chlordécone est un pesticide organochloré toxique et persistant qui a été massivement utilisé pour combattre le charançon dans les bananeraies de Martinique et de Guadeloupe, entre 1972 et 1993.
Alors que la dangerosité de ce pesticide est connue depuis 1969, il n'a été interdit en France métropolitaine qu'en 1990. Mais, conformément à la réglementation alors en vigueur, il a pu être commercialisé pendant deux années supplémentaires. Son emploi a continué jusqu'en 1993 grâce à deux dérogations accordées par le ministère de l'agriculture, sous la pression de planteurs et d'industriels.
Le chlordécone a provoqué de nombreux dégâts. Aujourd’hui, c’est l'ensemble de l'environnement qui est contaminé aux Antilles (terre, eau, rivières, mer, poissons, cheptels, fruits, légumes…). Cette pollution massive et durable touche en premier lieu la santé des populations. Selon une étude réalisée en 2018 par Santé publique France, 92% des Martiniquais et 95% des Guadeloupéens sont contaminés au chlordécone. Près de 77% des 12 700 travailleurs de la banane aux Antilles ont été possiblement exposés au chlordécone. La présence de ce pesticide a été détectée dans le sang maternel de 9 femmes sur 10.
L'exposition au chlordécone a, entre autres effets : chez la femme enceinte, un risque de naissance prématurée ; chez l'enfant des impacts hormonaux et des conséquences sur la croissance et le neuro-développement ; chez l'homme, un risque augmenté de cancer de la prostate et de sa récidive… La Martinique détient notamment le (triste) record du monde de cancers de la prostate, avec 227 nouveaux cas pour 100 000 hommes chaque année. La Guadeloupe est elle aussi très touchée par cette maladie.
Une autre conséquence (et pas des moindres) est qu'il n'est plus possible d'exploiter de la même manière les terres ou les eaux contaminées (agriculture, élevage, fermes aquacoles…). Des limites maximales de résidus ont été établies au-delà desquelles les denrées ne peuvent plus être commercialisées.
Emmanuel Macron, le président de la République déclarait en septembre 2018, que cet usage avait été le "fruit d'un aveuglement collectif , obligeant l'État à prendre sa part de responsabilité dans cette pollution et à avancer dans le chemin de la réparation".
Alors que la dangerosité de ce pesticide est connue depuis 1969, il n'a été interdit en France métropolitaine qu'en 1990. Mais, conformément à la réglementation alors en vigueur, il a pu être commercialisé pendant deux années supplémentaires. Son emploi a continué jusqu'en 1993 grâce à deux dérogations accordées par le ministère de l'agriculture, sous la pression de planteurs et d'industriels.
Le chlordécone a provoqué de nombreux dégâts. Aujourd’hui, c’est l'ensemble de l'environnement qui est contaminé aux Antilles (terre, eau, rivières, mer, poissons, cheptels, fruits, légumes…). Cette pollution massive et durable touche en premier lieu la santé des populations. Selon une étude réalisée en 2018 par Santé publique France, 92% des Martiniquais et 95% des Guadeloupéens sont contaminés au chlordécone. Près de 77% des 12 700 travailleurs de la banane aux Antilles ont été possiblement exposés au chlordécone. La présence de ce pesticide a été détectée dans le sang maternel de 9 femmes sur 10.
L'exposition au chlordécone a, entre autres effets : chez la femme enceinte, un risque de naissance prématurée ; chez l'enfant des impacts hormonaux et des conséquences sur la croissance et le neuro-développement ; chez l'homme, un risque augmenté de cancer de la prostate et de sa récidive… La Martinique détient notamment le (triste) record du monde de cancers de la prostate, avec 227 nouveaux cas pour 100 000 hommes chaque année. La Guadeloupe est elle aussi très touchée par cette maladie.
Une autre conséquence (et pas des moindres) est qu'il n'est plus possible d'exploiter de la même manière les terres ou les eaux contaminées (agriculture, élevage, fermes aquacoles…). Des limites maximales de résidus ont été établies au-delà desquelles les denrées ne peuvent plus être commercialisées.
Emmanuel Macron, le président de la République déclarait en septembre 2018, que cet usage avait été le "fruit d'un aveuglement collectif , obligeant l'État à prendre sa part de responsabilité dans cette pollution et à avancer dans le chemin de la réparation".
Ce que dit la proposition de loi d’Elie Califer
Le député guadeloupéen Elie Califer, auteur de la proposition de loi, affirme qu’aucun progrès n'est intervenu depuis la déclaration du président de la République. Elie Califer considère que la responsabilité de l'État doit enfin être officiellement reconnue dans le scandale sanitaire du chlordécone et ainsi ouvrir un droit à indemnisation pour les victimes de ce pesticide.
Votée à l’unanimité des votants, les groupes de la majorité s’étant abstenus, la proposition de loi Elie Califer vise à reconnaître la responsabilité de l'État dans les préjudices sanitaires, écologiques et économiques liés au chlordécone, subis par la Guadeloupe et la Martinique et leurs populations. Au nombre des préjudices, les députés ont ajouté par amendement les préjudices moraux.
Le texte assigne également à l’Etat des objectifs de dépollution des terres et des eaux contaminées et d'indemnisation des victimes, qu'elles aient été contaminées dans le cadre d'une activité professionnelle ou non, et des territoires.
Les députés ont, par amendements, ajouté à l'Etat de nouveaux objectifs :
Votée à l’unanimité des votants, les groupes de la majorité s’étant abstenus, la proposition de loi Elie Califer vise à reconnaître la responsabilité de l'État dans les préjudices sanitaires, écologiques et économiques liés au chlordécone, subis par la Guadeloupe et la Martinique et leurs populations. Au nombre des préjudices, les députés ont ajouté par amendement les préjudices moraux.
Le texte assigne également à l’Etat des objectifs de dépollution des terres et des eaux contaminées et d'indemnisation des victimes, qu'elles aient été contaminées dans le cadre d'une activité professionnelle ou non, et des territoires.
Les députés ont, par amendements, ajouté à l'Etat de nouveaux objectifs :
- Conduire des actions visant à supprimer le risque d'exposition au chlordécone ;
- Evaluer les effets sanitaires et environnementaux des interactions entre l'ensemble des produits phytosanitaires utilisés dans les Antilles et les produits à base de chlordécone ;
- Etablir publiquement la responsabilité des décideurs politiques dans ce scandale d’État";
- Mettre en place une campagne de prévention sur l'ensemble du territoire national encourageant le dosage du chlordécone dans le sang (chlordéconémie) ;
- Dépister systématiquement le cancer de la prostate après 45 ans pour les populations de Guadeloupe et de Martinique ;
- Confier l'évaluation de tous les objectifs fixés par la proposition de loi (dépollution, recherche, indemnisation) à une instance indépendante. Elle devra rendre un premier rapport au plus tard fin 2025, puis tous les trois ans sur les actions mises en œuvre.
D'autres amendements ont complété le texte :
- Le gouvernement devra remettre au Parlement au plus tard début 2025 un rapport établissant la présence ou l'absence de chlordécone dans les sols (en particulier dans les zones productrices ou ayant produit des pommes de terre et les zones agricoles de l'île de La Réunion) ;
- Pour compenser les dépenses pour l’État engendrées par la proposition de loi et en vertu du principe 'pollueur-payeur", une taxe additionnelle de 15% est créée sur les bénéfices générés par l'industrie des produits phytosanitaires.
La proposition de loi doit à présent être examinée par le Sénat.
Les réserves du côté du camp macroniste
La députée Renaissance (RE), Charlotte Parmentier-Lecocq a rappelé que les “faits” remontaient à “plus de 30 ans” et dit craindre une chasse aux sorcières… Elle surenchérit en estimant qu’il ne faut pas imputer à l’Etat la seule responsabilité de l’utilisation d’un pesticide démontré dangereux par les plus hautes instances scientifiques. C’est ainsi qu’elle a déclaré à l’AFP : “C’est important de reconnaître une part de responsabilité de l’Etat, mais la responsabilité est partagée, sinon c’est un peu facile”, citant les fabricants du chlordécone, les propriétaires d’exploitation qui l’utilisaient et les élus locaux “qui plaidaient à l’époque pour des dérogations”. Selon elle, il y a un “flou artistique” du texte initial d’Elie Califer. Il n’apporterait pas de “réponses concrètes sur la dépollution et l’indemnisation” des victimes. On peut rétorquer à ces “craintes” : A quoi servent les décrets d’application, si ce n’est à préciser le fond de la loi ?
Elie Califer a précisé à l’AFP : “On a besoin que la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat soit inscrite dans le marbre de la loi. C’est important pour nous. Les territoires des Antilles se sentent abandonnés à leur sort. Après, viendront les questions d’organisation et du fonds d’indemnisation.
Elie Califer a précisé à l’AFP : “On a besoin que la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat soit inscrite dans le marbre de la loi. C’est important pour nous. Les territoires des Antilles se sentent abandonnés à leur sort. Après, viendront les questions d’organisation et du fonds d’indemnisation.
Un combat pour la reconnaissance
Pour les populations antillaises, c’est le début de la consécration d’un combat mené de longue date. En effet, depuis 18 ans, les citoyens se mobilisent pour réclamer vérité, justice et réparation. Contrairement à ce que mettent en avant les députés de la majorité présidentielle, les revendications et la colère sont dirigées contre LES responsables du scandale et non pas contre l’Etat exclusivement. Il n’y a pas un seul et unique responsable de ce désastre humain et écologique. Les grands propriétaires de plantations, les politiques locaux ont, eux aussi, une grande part de responsabilité.
Ainsi, quand en janvier 2023, la justice avait prononcé un non-lieu dans l’affaire sur l’empoisonnement au chlordécone, les populations guadeloupéenne et martiniquaise étaient, à juste titre, déçues et très en colère. D’autant plus qu’en mars 2022, les juges d’instruction du pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris, avaient annoncé la fin des investigations dans cette affaire sans avoir procédé à des mises en examen. Cette décision incompréhensible avait suscité un tollé.
Suite au vote de la loi proposée par Elie Califer, Le collectif Lyannaj pou dépoliyé Gwadloup (Alliance pour la dépollution de la Guadeloupe) a estimé que le texte n’allait pas assez loin, notamment en n’impliquant pas les producteurs de l’époque. “Nous sommes favorables, bien sûr, à une reconnaissance de la responsabilité de l’Etat”, souligne Laurence Maquiaba, membre de ce collectif, “mais nous ne pouvons pas considérer que l’Etat est seul responsable, les pollueurs doivent aussi être concernés.”
En Martinique aussi, les militants attendent plus. Pour Philippe Pierre-Charles, porte-parole du collectif Simenn Matinik doubout, gaoulé kont chlordécone (Semaine de la Martinique debout - révolte contre le chlordécone), cette reconnaissance serait “un élément non négligeable mais doit ouvrir la porte à un programme de réparation. Et là, ce n’est pas encore ce qui est mis clairement sur la table”, déplore-t-il.
En cas d’échec au Parlement, les Martiniquais resteront déterminés, prévient Philippe Pierre-Charles : “C’est la pression populaire qui compte. Si jamais les macronistes ne le comprennent pas, il faudra une mobilisation.”
Sources des informations : Vie Publique, Libération.
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Ainsi, quand en janvier 2023, la justice avait prononcé un non-lieu dans l’affaire sur l’empoisonnement au chlordécone, les populations guadeloupéenne et martiniquaise étaient, à juste titre, déçues et très en colère. D’autant plus qu’en mars 2022, les juges d’instruction du pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris, avaient annoncé la fin des investigations dans cette affaire sans avoir procédé à des mises en examen. Cette décision incompréhensible avait suscité un tollé.
Suite au vote de la loi proposée par Elie Califer, Le collectif Lyannaj pou dépoliyé Gwadloup (Alliance pour la dépollution de la Guadeloupe) a estimé que le texte n’allait pas assez loin, notamment en n’impliquant pas les producteurs de l’époque. “Nous sommes favorables, bien sûr, à une reconnaissance de la responsabilité de l’Etat”, souligne Laurence Maquiaba, membre de ce collectif, “mais nous ne pouvons pas considérer que l’Etat est seul responsable, les pollueurs doivent aussi être concernés.”
En Martinique aussi, les militants attendent plus. Pour Philippe Pierre-Charles, porte-parole du collectif Simenn Matinik doubout, gaoulé kont chlordécone (Semaine de la Martinique debout - révolte contre le chlordécone), cette reconnaissance serait “un élément non négligeable mais doit ouvrir la porte à un programme de réparation. Et là, ce n’est pas encore ce qui est mis clairement sur la table”, déplore-t-il.
En cas d’échec au Parlement, les Martiniquais resteront déterminés, prévient Philippe Pierre-Charles : “C’est la pression populaire qui compte. Si jamais les macronistes ne le comprennent pas, il faudra une mobilisation.”
Sources des informations : Vie Publique, Libération.
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