Comprendre la vague de licenciements qui affecte la génération Z

10 octobre 2024 11:56

© Canva
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Un phénomène récent agite le monde du travail : la génération Z (aussi appelée gen Z), ces jeunes nés entre la fin des années 1990 et le début des années 2010, fait face à une série de licenciements peu de temps après leur embauche. Selon un sondage en ligne commandé par le site américian Intelligent.com et réalisé sur Pollfish en août 2024, six employeurs sur dix affirment avoir déjà licencié un membre de cette génération, quelques mois seulement après l’avoir recruté. Mais que se passe-t-il exactement ?


Une fracture générationnelle

Selon le sondage  Intelligent.com mené auprès de 966 chefs d’entreprise américains impliqués dans les décisions d’embauche, 94% des entreprises ont recruté de jeunes diplômés cette année. Cependant, seuls 25% des employeurs déclarent que toutes ces embauches se sont bien déroulées. En revanche, 62% signalent que seules certaines embauches ont été réussies, tandis que 14% indiquent que peu ou aucune de ces nouvelles recrues n’ont répondu aux attentes. Ces données soulignent les défis rencontrés par les jeunes diplômés dans leur intégration au monde du travail.

Les principales raisons évoquées pour expliquer ces licenciements précoces incluent un manque de motivation ou d’initiative (50%), des compétences de communication jugées insuffisantes (39%) et un manque de professionnalisme (46%). D'autres motifs courants incluent : des difficultés à accepter les critiques (38%), une incapacité à résoudre des problèmes (34%), ainsi que des comportements inadéquats tels que : des retards répétés (20%), une garde-robe non adaptée (19%) ou encore un langage inapproprié pour travailler (19%). La liste des critiques à l’égard de la jeune génération semble donc bien longue à mesure qu’elle entre sur le marché du travail.

Pour beaucoup, l’origine du problème réside dans un choc des générations. La génération X (les personnes nées entre les années 1960 et 1979, après le baby-boom), souvent en position de management, peine parfois à comprendre les attentes et le comportement de la génération Z. Ces jeunes actifs, digital natives, apportent avec eux des valeurs et une vision du travail bien différentes de leurs aînés. Ils privilégient la flexibilité, l'équilibre entre vie professionnelle et personnelle, et recherchent un travail qui ait du sens, plus qu’une simple carrière. Mais dans des entreprises plus traditionnelles, encore ancrées dans des structures hiérarchiques rigides, ces attentes peuvent être perçues comme un manque d’engagement ou de professionnalisme.

Pourtant, le phénomène est encore plus profond qu’un simple choc de générations. En effet, des managers eux-mêmes issus de la génération Z ont ce ressenti "négatif" vis-à-vis de leurs collègues du même âge.


Une adaptation difficile au monde de l’entreprise

La majorité des entreprises américaines interrogées (60%) déclarent avoir dû licencier un jeune diplômé universitaire embauché cette année. La génération Z, bien qu’intrépide et résiliente, peut parfois avoir des difficultés à s’adapter à la culture d'entreprise actuelle. Ayant grandi dans un monde ultra-connecté et souvent plus autonome grâce aux plateformes numériques, certains membres de cette génération montrent une faible tolérance pour les processus lents ou les environnements de travail trop cadrés. Ils aspirent à un environnement qui valorise l’innovation, la collaboration et la transparence.

Comme l’explique Huy Nguyen, conseiller en chef de l’éducation et du développement de carrière chez Intelligent, cette jeune génération manque fréquemment de compétences pratiques et de soft skills (compétences générales), telles que l’autonomie, la communication, et la gestion des priorités. Cette inadéquation entre leurs compétences théoriques et les attentes des employeurs est l’une des principales raisons de leur faible performance dans les entreprises.

Les entreprises s’attendent souvent à ce que ces jeunes professionnels soient immédiatement opérationnels, capables de prendre des initiatives et de s'adapter à des environnements souvent chaotiques et peu structurés. Or, la transition entre les études, marquées par une organisation rigide, et le travail, où l’autonomie et la prise de décision rapide sont de mise, n’est pas toujours facile. Huy Nguyen souligne que ce fossé entre les attentes des entreprises et la réalité vécue par la génération Z est souvent responsable des difficultés d’intégration.

Un autre problème évoqué par les entreprises est l’attitude parfois perçue comme désengagée de la génération Z. Des employeurs se plaignent d’un manque de motivation ou d’initiative, une mauvaise communication, et une incapacité à accepter les critiques constructives. Cela s'ajoute à d'autres problématiques telles que des retards répétés ou des tenues inappropriées, qui créent une impression de manque de professionnalisme. Cependant, Huy Nguyen affirme que ces problèmes peuvent être surmontés si les entreprises investissent dans des programmes d’accompagnement pour aider ces jeunes employés à s’adapter plus facilement.

Un point important soulevé dans cette situation est la responsabilité partagée des entreprises. Selon Huy Nguyen, les entreprises ne peuvent se contenter de blâmer les jeunes diplômés pour leur manque de préparation. Elles ont également un rôle à jouer dans leur intégration, en particulier en mettant en place des programmes d’onboarding (intégration des employés) formels qui exposent clairement les attentes en termes de culture d’entreprise et de performances. Ces programmes doivent offrir un encadrement initial solide, un mentorat régulier, et des retours constructifs pour aider la génération Z à réussir.

En outre, le recours aux mentors dans les entreprises peut s'avérer particulièrement bénéfique. Un mentor expérimenté peut aider les jeunes employés à mieux comprendre les attentes du milieu professionnel, à naviguer dans la complexité des relations internes, et à prendre des décisions de manière plus autonome. Ce type de soutien est essentiel pour faciliter une transition en douceur vers le monde du travail et permettre aux jeunes professionnels de la génération Z de s’épanouir.


Le rôle de l’environnement post-pandémique sur les embauches de nouveaux diplômés 

La pandémie de Covid-19 a profondément modifié les modèles de travail traditionnels, en plaçant le télétravail et les outils numériques au cœur des pratiques professionnelles. Cette transition vers un cadre de travail plus flexible a été accompagnée d'une attente croissante selon laquelle l'environnement de travail devrait s'ajuster aux besoins des employés, plutôt que l'inverse. Pour la génération Z, qui a débuté sa carrière en grande partie durant cette période de bouleversement, cette flexibilité est devenue une priorité. Cependant, cela a engendré des tensions avec des employeurs, souvent peu enclins à adopter des mesures flexibles.

Face à cette dynamique, les jeunes salariés, souvent moins expérimentés dans la navigation des exigences d'un environnement professionnel complexe, peuvent se retrouver rapidement en difficulté. Leur manque d’expérience peut les amener à être marginalisés ou à vivre des ruptures avec leurs entreprises. Cela pose un défi supplémentaire dans un contexte où 1 entreprise sur 7 pourrait ne pas embaucher de nouveaux diplômés universitaires en 2025, soulignant la précarité de leur situation sur le marché du travail post-pandémique. Selon le sondage, la majorité (84%) des entreprises aux Etats-Unis prévoient d’embaucher de jeunes diplômés en 2025, tandis qu’environ 5% ne le feront pas et 10% sont incertains.

Pour les entreprises qui n'envisagent pas d'embaucher de nouveaux diplômés, les raisons principales incluent le refus d'embaucher pour des postes de premier échelon (51%), des doutes sur la préparation de la génération Z à intégrer le marché du travail (31%) et des taux de roulement élevés parmi les nouveaux diplômés (31%). D'autres motifs évoqués sont des expériences passées négatives avec de jeunes diplômés (27%) et une préférence pour les promotions internes ou les transferts (22 %).

Les tensions entre les attentes de la génération Z et la réalité des employeurs pourraient ainsi avoir des conséquences durables sur leur intégration professionnelle et leur évolution de carrière.


Des solutions pour les entreprises : s'adapter à cette nouvelle génération

Pour limiter ces licenciements précoces, il est essentiel que les entreprises repensent leur manière d'intégrer les jeunes talents. La mise en place de programmes de mentorat, d'un dialogue intergénérationnel ouvert, et d'une plus grande flexibilité sur les modes de travail peuvent être des solutions efficaces. Un équilibre entre l’accompagnement et l’autonomie est essentiel pour attirer et retenir ces jeunes collaborateurs qui, lorsqu’ils sont bien intégrés, peuvent apporter un souffle d'innovation et de nouvelles idées à l’entreprise.

D’ailleurs, le sondage montre que près de la moitié (46%) des responsables du recrutement pensent que les diplômés universitaires devraient absolument suivre une formation sur l’étiquette au bureau (se rapporte aux règles d'interaction avec les collègues au travail), tandis que 42% pensent qu’ils devraient probablement le faire. Actuellement, 54% des entreprises américaines interrogées proposent une telle formation, 48% la rendent obligatoire pour toutes les nouvelles recrues, 24% l’exigent spécifiquement pour toutes les embauches de la génération Z et 16% l’imposent à tous les membres de l’entreprise.

Cette vague de licenciements au sein de la génération Z témoigne d’une adaptation nécessaire des deux côtés. Si les jeunes actifs doivent s'ajuster à certains aspects du monde professionnel, les entreprises, de leur côté, devront apprendre à mieux comprendre et répondre aux attentes spécifiques de cette génération pleine de potentiel.

Mais, qu'en est-il en France ? Le phénomène est-il le même ? 

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