Quand le ghosting s’immisce dans le recrutement

2 septembre 2022 17:07

Le ghsoting en recrutement, un phénomène en hausse.
Le ghosting est un anglicisme, il vient du mot ghost qui signifie fantôme en français. C'est une pratique "en amour" peu galante qui vise à mettre un terme brutal et définitif à une relation sans prévenir le ou la principal(e) intéressé(e), ni lui donner la moindre explication. Autrement dit, le ghosteur ou la ghosteuse devient un fantôme, disparaissant dans la nature et ne donnant plus aucun signe de vie. En général, ceux qui s’y adonnent bloquent l’autre de tous ses supports (numériques et téléphoniques), au cas où il/elle aurait l’audace de réclamer des explications. Cette tendance est apparue au milieu des années 2000 avec l'explosion des sites et applications de rencontres mais aussi, avec le développement des réseaux sociaux. Le ghosting s’est depuis étendu à toutes les strates de la société. Dans le domaine des ressources humaines, le ghosting est devenu de plus en plus courant. Mais, en quoi consiste t-il ?

Les origines du ghosting en recrutement

Le ghosting en recrutement est le fait de disparaître du jour au lendemain sans donner d’explication à l’autre partie lors du processus de recrutement (et même post-recrutement). 

Le ghosting en recrutement n’est pas un phénomène nouveau. En effet, les recruteurs le pratiquent depuis la nuit des temps et ce, quelle que soit la taille de l’entreprise. Faire passer un entretien à un candidat (qui a pris le soin de préparer son CV, son discours, ses arguments, sa tenue et d’effectuer des recherches sur ladite société...) et ne pas avoir le professionnalisme mais aussi la courtoisie élémentaire ainsi que la politesse de le rappeler ou du moins d’envoyer un mail pour lui signifier que sa candidature n’a pas été retenue, est une coutume érigée quasi en institution dans le monde du travail. Pire encore, certains recruteurs ne prennent même pas la peine de répondre aux relances téléphoniques ou par mail des candidats fébriles dans l’attente d’une réponse qui ne viendra jamais. L’impact psychologique et sur la confiance en soi des candidats se retrouve logiquement très ébranlé, ce qui entraîne à juste titre, une mauvaise image de ces sociétés. Si ces entreprises qui ne donnent plus signe de vie ne sont pas capables de dire les choses clairement avec honnêteté et sincérité, comment peuvent-elles manager des équipes de façon efficiente ?

Il y a quelques années de cela, il n’existait pas de terme désignant cette tendance mais il s’agissait bel et bien de ghosting. Aujourd'hui, la donne a changé et s’est plutôt inversée. En effet, le ghosting n’est plus du seul fait de l’employeur mais aussi du candidat. Et là, ça pose un véritable problème. On vous explique pourquoi. 

Le ghosting à l’ère post Covid, la nouvelle tendance ?

La crise sanitaire de 2020 a bouleversé le monde du travail. Nombre de salariés ont profité de cette crise mondiale pour repenser leur mode de vie, prioriser le bien-être et le confort au profit d’un travail insuffisamment valorisé, faire passer sa santé avant tout, refuser d’être sous-rémunéré. Si ces conditions n’étaient pas réunies, ces employés de l’ère post Covid préféraient démissionner, voire changer de secteur d’activité. Cette tendance était et est toujours encore très présente dans les secteurs de l’hôtellerie et la restauration, la santé (les hôpitaux en particulier), les services à la personne (auxiliaire de vie, aide-soignant, femme de ménage, garde d’enfants à domicile…) ou encore le numérique. Conséquence ? De nombreuses places restent vacantes dans ces secteurs. Les candidats ont un vaste choix et ne prennent plus la peine d’informer leur futur employeur que le poste ne les intéresse pas ou plus. Ainsi, ils n’hésitent plus à ghoster les employeurs sans leur donner la moindre explication. Un retour de bâton ?

Là où le bas blesse, c’est quand les candidats ne daignent même pas se présenter à l’entretien d’embauche. Bien entendu, ils ne préviennent pas le recruteur de leur absence. Les employeurs et DRH rapportent qu’ils ont beau les relancer mais en vain… pas de réponse. Certains candidats se payent même le luxe de ne pas se présenter lors du premier jour d’intégration dans les locaux de leur nouvelle entreprise alors qu’ils ont signé un contrat (CDD ou CDI). D’autres désertent la société sans mot dire au bout de quelques jours, soit bien avant la fin de la période d’essai.

Ces pratiques sont répandues depuis une petite dizaine d'années dans les emplois saisonniers, précaires et en intérim. Les employés acceptent ces postes en attendant de trouver mieux ailleurs puisque l’offre a toujours été pléthore, encore plus depuis la période post Covid. Ils disent oui au premier employeur, trouvent mieux deux jours plus tard puis zappent celui avec qui le “deal” de départ avait été conclu. Seulement aujourd’hui, ce sont tous les secteurs et tous les postes, y compris les cadres (les profils experts sont en forte baisse), qui sont touchés par le phénomène du ghosting. Les candidats ghostent sans remords les sociétés, peu importe que le processus de recrutement soit (très) avancé ou non.

Actuellement le contexte économique est très favorable. En 2022, on table sur une croissance exceptionnelle de 4%. Le marché est dynamique pour tout le monde. Ainsi, les recruteurs sont en situation de faiblesse face à une pénurie de candidats qui ne manquent pas de propositions de travail.

La nouvelle génération, en plus d’avoir des exigences non-négociables (une meilleure atmosphère de travail, un salaire revu à la hausse, plus de congés, des horaires aménagés, des outils adaptés, un emploi qui fait sens…), elle n’hésite pas à ignorer sans se retourner un à plusieurs employeurs pour voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Avec la digitalisation des candidatures qui permet de postuler en seulement quelques clics à plusieurs offres d’emploi, il est tellement plus simple de zapper les recruteurs sans prendre la peine de les prévenir. 

Comment faire face au ghosting ? 

Du côté des employeurs

Les employeurs n’hésitent pas à faire part de leur dépit face à cette situation. Ils se retrouvent face à des candidats de plus en plus exigeants (pour qui la valeur travail n’est pas aussi primordiale que leurs aînés), mais aussi face à des personnes susceptibles de les ghoster à n’importe quel moment. Sans compter la pénurie de candidats à laquelle les entreprises doivent faire face, celles-ci doivent vite trouver une solution pour tenter de régler ces problèmes de recrutement.

Pour retenir un candidat possible ghosteur ou du moins l’inciter à prévenir de son non-engagement pour le poste, des leviers sont à activer :

  • Raccourcir les délais de recrutement : plus les délais de recrutement sont longs, plus le risque que le candidat aille voir ailleurs est élevé. 
  • Personnaliser les échanges dès le début du processus de recrutement : il s’agit d’apprendre à connaître le candidat en lui envoyant par exemple un email personnalisé, en l’appelant au téléphone ou en visio-conférence pour établir un premier contact, en le contactant par SMS etc… 
  • Mettre en évidence les valeurs humaines, sociales, environnementales de la société pour donner envie au candidat de poursuivre l'aventure.  
  • Communiquer en toute transparence sur le poste proposé en amont comme en aval : il ne doit pas y avoir de dichotomie entre l’offre d’emploi parue sur les plateformes en ligne et le discours tenu par le recruteur lors de l’entretien. Il faut être le plus transparent possible sur les compétences recherchées, le salaire proposé, les objectifs fixés, les méthodes de management et les avantages du poste.

    Nota bene. Le fait de se faire ghoster par des candidats amènera sans doute les sociétés à ne plus faire de même. 

Du côté des candidats

Les candidats doivent se montrer transparents sur leurs attentes professionnelles, leur recherche d’emploi et les retours en attente d’autres employeurs. En bref, ils doivent COMMUNIQUER en toute sincérité. A ce titre, les coachs en recrutement sont d'excellents conseils. 

Les candidats doivent également se responsabiliser, faire preuve de savoir-vivre et de savoir-être. En clair, appliquer les qualités qu’ils ont mises en avant dans leur CV. Ghoster des sociétés est loin d’être productif. C’est faire preuve de non-professionnalisme et d’irrespect. Et puis, tout comme en amour, la roue tourne. Les cabinets de recrutement, les chasseurs de têtes et les sociétés s’en souviennent… Il est très facile de blacklister un candidat et d’afficher les ghosteurs sur les réseaux sociaux. D’ailleurs, certaines sociétés 2.0 ne se sont pas gênées pour dénoncer des candidats ghosteurs. On ne sait pas de quoi est fait l’avenir, ghosteurs et ghostés peuvent se retrouver face à face. Et là, ça peut faire mal. Ne dit-on pas que la vengeance est un plat qui se mange froid ? A méditer…

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